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XXXXIII Fin de partie
Le "corps" de Kader sera incinéré. Sa mère voudrait un enterrement, une tombe. Mais j’apprenais qu’ils étaient mariés et souhaitaient l’incinération, ne voulaient surtout pas se retrouver dans un cimetière où après quelques décennies des employés municipaux font le ménage car personne n’entretient la concession. Je me souvenais forcément leur avoir parlé de ce sujet, après ma découverte d’écriteaux « Face au défi du temps et de ses outrages, cette sépulture se détériore ou semble laissée à l’abandon. Une procédure de reprise est engagée. Si vous souhaitez la préserver, veuillez vous présenter à la mairie pour la démarche à suivre. » Même sur de magnifiques tombeaux dans le cimetière de Cahors derrière les remparts.
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C’est le maire qui m’en informa le mardi. Il avait délivré le permis d’incinérer. Il avait vu Nadège la veille, « pas en forme. » Elle était donc présente !
Je tombais des nues au sujet de leur mariage, prononcé à Toulouse le 10 mars 2012, avec pour témoins madame et monsieur Hanin. Marcel me le confirmait. Les jeunes leur avaient demandé de garder ce secret...
Je suppose qu’une petite enveloppe l’avait scellé.
L’incinération se déroulait à Cahors.
Le 11, au matin, Nadège décrochait enfin. Nous sommes partis ensemble. Je l’ai prise en passant. Rendez-vous au crématorium à 14 heures.
- Tu sais que je suis venu chaque jour et que je t’ai appelé des centaines de fois.
- Oui.
- Alors ?
- S’il te plaît, nous parlerons plus tard. Je vais très mal.
Je posais ma main droite sur sa jambe gauche. Elle souriait tristement, me l’a prise seulement trois fois à l’aller mais huit au retour, oui je les comptais, pour la porter à ses lèvres et l’embrasser tendrement. Je la sentais au bord des larmes.
Nous étions cinq. Nadège, la mère de Kader, une tante, une cousine. J’étais donc l’unique homme. Monsieur Hanin ne l’avait pas revu depuis son exhibition. Il m’avait déclaré la veille au soir « ma femme voudrait qu’on y aille mais ce n’est pas notre place. »
- Nadège, tu sais pourtant que tu peux tout me dire.
Elle s’est serrée contre moi et m’a susurré « je t’aime. » Mais arrivés au Pech :
- Non Stéphane, un autre jour... c’est difficile... je viendrai te voir, je te le promets... (et elle m’a susurré) Quoi qu’il arrive, n’oublie jamais que je t’aime, vraiment, comme je n’ai jamais aimé.
Je n’ai pas dormi. Maintenant, je me demande comment je n’ai pas deviné qu’elle était "câblée"…
Le lendemain, elle n’est pas venue et ses volets étaient fermés quand je suis passé vers 17 heures. Le vendredi 13, vers midi, idem...
Dans "Le roman de la révolution numérique", de Stéphane Ternoise
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Le roman de la révolution numérique
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