au pays des choses dernières, nous y sommes presque

"In the Country of Last Things", ce pays des choses dernières imaginé par Paul Auster

122 - D’Anna Blume à l’homme libre

En 1987, Paul Auster publiait "In the Country of Last Things", au pays des choses dernières. Mais la traduction française fut lancée sous le titre réducteur "Le Voyage d’Anna Blume." Car il s’agit bien d’un voyage au pays des choses dernières. Sous la forme d’une lettre dont on ignore la manière dont elle a pu sortir de cet enfer, Anna Blume raconte l’histoire de son errance sur un territoire coupé du monde, où elle a décidé de se rendre à la recherche de son frère.
« Il n’y a rien que les gens se retiennent de faire, et le plus vite tu l’auras compris, le mieux tu te porteras (…) Tôt ou tard, vient un moment où l’on ne fait plus l’effort de se relever (…) Tu ne peux survivre que si rien ne t’est nécessaire. (…) On pouvait travailler tant qu’on voulait, il n’y avait aucune possibilité de ne pas échouer. »

La France n’est pas ce « pays des choses dernières » ! Il faut certes accepter "une certaine pauvreté" pour vivre sans s’agenouiller (ou posséder un immense talent prétendront peut-être de belles dents en souriant)...
Jusqu’au jour où un "expert" signera le papier nécessaire et suffisant, naturellement pour le bien d’un vilain « connu pour son comportement marginal et son emportement à l’égard d’autrui », et l’écrivain mâté sera placé. Il « vivait dans des conditions d’hygiène déplorables » Ainsi fut-il noté sur le dossier de mon oncle pour sa mise sous tutelle, l’argument massue, rédhibitoire, spécifiant son absence de réponse au spécialiste venu interroger. Quel sauvage ! Procédure engagée par la mairie de Frévin-Capelle, à laquelle il refusait de vendre la parcelle entre sa propriété et le cimetière, finalement acquise à un prix m’ayant semblé très sous évalué. Quant au juge, il ne s’est pas soucié du certificat médical de profonde surdité ! Bande de charognards, il était sourd, tout simplement. Donc ne comprenait pas vos simagrées. J’étais loin, à 900 kms, ces faits me sont parvenus après son décès.
Ils se recrutent toujours facilement, les "experts" pour ce genre de formalités bien rémunérées, comme il s’en trouvait pour envoyer dans un camp de rééducation ou d’extermination. Il existe également les dénonciations mensongères et calomnieuses, comme celle du 4 juillet 2016, pour laquelle le Procureur de la République du TGI de Cahors a finalement prononcé un "avis de classement".

En 2005, dans Brooklyn Folies, le même Paul Auster : « L’oeuvre de Thoreau représente un combat incessant contre le statu quo, une lutte pour trouver une nouvelle façon de vivre ici (...) Du moment qu’un homme avait le courage de rejeter ce que la société lui imposait, il pouvait vivre comme il l’entendait. Dans quel but ? Pour être libre. Mais libre dans quel but ? Dans le but de lire des livres, d’en écrire, de penser. Libre d’écrire un livre tel que Walden.» Ce courage, Nathan y revient en conseillant son neveu : « un endroit où vivre selon ta conscience. Mais pour ça, tu dois être prêt à renoncer à la société. Tu as ce courage Tom ? Est-ce que l’un d’entre nous a le courage de faire ça ? »

En 2021, avoir le courage de rejeter la voie imposée par la société constitue un préliminaire toujours indispensable.
Naturellement, pour des vieillards tels que Luc Ferry ou Aurélien Pradié, le but de lire des livres, d’en écrire, de penser apparaîtrait sûrement bien dérisoire. Leur philosophie est chiraquienne !

Je sens chez certains l’envie de ne plus laisser à l’homme la possibilité de rejeter les fondamentaux de la société hiérarchique et concurrentielle, la toute puissance de l’argent, la mainmise des héritiers, le triomphe des troisièmes couteaux soumis et heureux de régner sur des masses en dessous d’eux.

livre du candidat

Article du 10 janvier 2022 à 14 : 43. Article précédent : L’inconnu d’Attali fut donc Macron, méfiez-vous en 2022... (sur ce blog)